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Sarra El Abed : son film  » Y a pas d’heures pour les femmes » dans le New Yorker

Après avoir remporté le Prix du meilleur court métrage canadien à Hot Docs – un prix le rendant éligible pour la course aux Oscars – le film «  Y a pas d’heure pour les femmes  » de Sarra El Abed vient de décrocher une nomination aux prestigieux IDA Documentary Awards et est diffusé dans le New Yorker ( https://www.newyorker.com/video/watch/the-personal-and-the-political-at-a-tunisian-salon?c=series ).  Une consécration non négligeable pour le 4ème film de cette réalisatrice neoquébécoise d’origine tunisienne.

Après s’être illustré avec 68 sélections en festivals et 22 prix,  » Y a pas d’heure pour les femmes » continue de susciter de l’intérêt, sûrement en raison du sujet mis en avant : la femme tunisienne dans la Tunisie post-Zine el-Abidine Ben Ali. Pour Sarra El Abed « Il y avait une envie dans ce film de retour aux sources, une envie d’immortaliser ma grand-mère, figure incontournable et grande inspiration. De redevenir spectatrice, comme pendant mon enfance, de ses débats acharnés autour d’une cigarette et d’une mise en plis. Car au fond, la condition de la femme en Tunisie relève de l’intime pour moi. J’ai passé mon enfance à leur promettre que je les raconterai et c’est un peu avec cette envie folle d’enfant que j’ai tourné ce film. » .

La réalisatrice retourne dans un lieu marquant de son enfance : l’exigu salon de coiffure de Saïda, à Tunis. À la veille des élections, elle plaque sa caméra sur un monde politique fascinant. À travers les teintures et séchoirs à cheveux, les phrases fusent. Dans cette valse entre le français et l’arabe se révèlent tous les enjeux qui animent le pays. Accompagnée d’une petite équipe uniquement féminine, Sarra El Abed revient au bercail pour créer une ode aux femmes de sa jeunesse. Ce film de 19 minutes, empruntant les codes d’un cinéma-vérité, se démarque par son humour et sa fraîcheur.

Nous sommes quelques jours avant l’élection présidentielle tunisienne de 2019. Un groupe de femmes se réunit dans un salon de coiffure de la ville de Tunis, où El Abed a grandi. Elles se prélassent, bavardent et se cajolent mutuellement sur les mérites des différents candidats. Une journée passe, ou peut-être plus. L’élection n’était que la deuxième après l’éviction de l’ancien dictateur  Ben Ali ; pour les femmes du film, c’est une expérience relativement nouvelle que de participer à une élection dont le nom du vainqueur n’est pas connu à l’avance.

 

Ennahda, un parti politique à tendance islamique, a gagné en popularité depuis les manifestations de 2011, et certaines des femmes s’inquiètent de ce que cela pourrait signifier pour les droits des femmes dans le pays. Lorsque la plus jeune femme du salon, une jeune fille de dix-huit ans sur le point de voter pour la première fois, annonce qu’elle va voter pour le candidat d’Ennahda, les femmes plus âgées sont consternées. « Je vais te couper les cheveux très, très courts pour cette chose stupide que tu as l’intention de faire« , lui dit immédiatement une coiffeuse. D’autres femmes interviennent. Elles expriment leurs craintes quant à ce que ferait le parti conservateur, rappelant les allégations de violence qui ont circulé à propos d’Ennahda mais qui n’ont pu être vérifiées. La jeune femme riposte. En parlant de leurs profonds désaccords politiques, les femmes restent pleines d’entrain – un équilibre qui est caractéristique de la teneur du film.

 

(c) Neoquébec – novembre 2021

 

 

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